Grand amiral de la flotte ottomane au XVI° siècle, Piri Reis est surtout connu pour son œuvre de cartographe. Malgré son statut de héros national, on sait peu de chose sur l’enfance de Piri Reis.

Il s’engagea très jeune comme corsaire auprès de son oncle Kemal Reis, alors amiral de la flotte ottomane, et participa à de nombreuses batailles navales contre l’Espagne et les République de Gênes et de Venise.

A la mort de Kemal, en 1511, il entreprit la rédaction de son célèbre livre de navigation , le Kitab-i Bahriye comprenant plus de 200 cartes des îles et des côtes méditerranéennes et atlantiques. En 1513, il s’attelle à reproduire une carte du monde comprenant des détails relatifs aux continents qu’il retrace. Cette carte, oublié pendant de nombreuses années, fait sa réapparition dans les archives du Palais de Topkapi en 1929 !

En 1516, il reprit la mer et participa à la conquête de l’Égypte. Nommé amiral de la flotte ottomane en 1547, il reprit aux Portugais les bases stratégiques contrôlant l’océan Indien, mais ayant abandonné le siège d’Ormuz, il fut décapité au Caire en 1553.

Parcours Visuel

Hispaniola

Parmi toutes les îles caribéennes découvertes par Colomb, Piri Reis a manifestement privilégié Hispaniola, qu’il appelle « Izle despanya » – « Île Espagnole » -, en la surdimensionnant et en l’illustrant de montagnes, de fortifications et d’un perroquet. En revanche, il l’oriente nord-sud alors qu’elle est en réalité est-ouest, peut-être pour rappeler l’orientation de « Cipangu » – nom donné au Japon par Marco Polo -, où Colomb pensait avoir débarqué.

L’Amérique du Sud

Pour les Ottomans, le Nouveau Monde était aussi exotique que l’Extrême-Orient l’avait été pour les cartographes chrétiens du Moyen Âge. La côte atlantique de l’Amérique du Sud fourmille aussi de singes, d’animaux et de créatures étranges rappelant notamment les « Blemmyes » – êtres dont la tête se trouve à la place du torse, qui figuraient déjà sur certaines mappemondes médiévales. Encore inconnu, l’intérieur du continent est occupé par du texte rédigé en turc ottoman.

Une côte antarctique

L’une des caractéristiques les plus troublantes de la carte de Piri Reis est la figuration détaillée d’une côte prolongeant la zone australe de l’Amérique du Sud, dont certains prétendent qu’elle ressemble au littoral du continent antarctique – qui ne fut découvert officiellement qu’en 1818 – tel qu’il se présente sous la glace – ce qui ferait remonter les informations à près de 10 000 ans…

Mais les interprétations faisant intervenir des phénomènes paranormaux ont toutes été réfutées par les scientifiques.

Rose des vents et barre d’échelle

Comme la plupart des portulans spécifiquement destinés à la navigation, la carte de Piri Reis est quadrillée de lignes de rhumb – chaque rhumb définissant un secteur d’1/32° de la rose des vents. La rose des vents  ci-dessous est placée sur le Tropique du Cancer et a son équivalent sur le Tropique du Capricorne. Il faut noter aussi l’exactitude du positionnement de l’Amérique du Sud par rapport à l’Afrique.

Saint Brendan

Cette image prouve à quel point Piri Reis était au fait des légendes chrétiennes. Elle illustre le récit médiéval ‘Navigatio Sancti Brendani abbatis’ relatant les voyages du moine irlandais Brendan de Clonfert, qui vécut au VI° siècle et se serait aventuré à bord d’une petite embarcation sur l’Océan Atlantique jusqu’à l’archipel des Antilles. On le voit ici faisant un feu sur le dos d’un poisson si grand qu’il l’avait confondu avec une île.

L’Afrique du Nord-Ouest

La côte nord-ouest de l’Afrique était déjà bien connue par les cartographes ottomans et européens. En effet, lorsque les Portugais entreprirent d’explorer la contrée à partir des années 1420, l’Islam était déjà fermement établi dans certaines régions, dont le Mali. Avec ses illustrations de flore, de faunes, de villes et de souverains, la carte de Piri Reis ressemble aux cartes européennes de la même époque.

Source : Cartes d’exception, Jerry Broton, 2015, 256 pages