A l’occasion de la commémoration, le 10 février prochain, du décès du Sultan Abdülhamid II, je publie une petite tribune.

44 – Abdulhamid II, le Sultan Calife

Mon Sultan de Cœur,
Jamais un sultan Ottoman n’a été autant diffamé et jeté en pâture dans la presse française que le Sultan Abdülhamid II, malgré toute la croissance que l’empire ottoman a connu à son époque, sur tous les niveaux.
Était-il vraiment un sultan sanguinaire comme le décrit Gilles Roy dans son livre « Le sultan rouge » édité en 1936 ?
Pourquoi un auteur français décide, en 1936, d’écrire un livre sur un sultan ottoman décédé 18 ans plus tôt. Peut-être que cette commande politique été provoquée par la nouvelle Turquie ?
La réponse serait simplement le fait que Gilles Roy n’a jamais existé !
En effet, c’est un plagiat d’articles de presse, créant une perception volontaire à l’égard du Sultan et de l’État Ottoman et, en dernier lieu, des Turcs. Nous pouvons également résumer ceci à l’image du sultan Abdülhamid II tel perçu de Paris.
Cette pratique journalistique de diabolisation du sultan, qui n’est autre que de la pure désinformation, va laisser ses traces longtemps. Ces articles serviront de base et seront utilisés à quelques nuances près, mot à mot, dans l’ouvrage “Abdul-Hamid, le Sultan rouge”, publié en 1936 sous le pseudonyme de Gilles Roy et préfacé par Léon Lamouche (1860-1945) qui publia – deux ans auparavant, et chez le même éditeur Payot – un ouvrage nommé « Histoire de la Turquie ».
Cette situation a parfaitement été décrite par le dicton: “ Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose ”. Şaban KİPER – Strasbourg – 05.02.2021

ABDÜLHAMID II – Le Sultan Calife

Abdülhamid II (1876-1909) a-t-il été le dernier grand sultan, modernisateur de l’Empire ottoman, ou le despote sanguinaire dénoncé à l’époque comme le « sultan rouge » ?
Né en 1842 au début des réformes des Tanzimat, monté sur le trône à trente-trois ans, il se retrouve à la tête d’un empire qui s’étend de l’Adriatique au golfe Persique et du Caucase à l’Afrique du Nord. Mais celui-ci est fragile, il est « l’homme malade de l’Europe ».
Confronté dès son avènement à l’une des plus graves crises de l’histoire ottomane, le sultan ne peut éviter une lourde défaite face aux armées russes ni les graves amputations territoriales du traité de Berlin.
Souverain d’un empire désormais moins étendu et affaibli, Abdülhamid met tout en œuvre pour le redresser. Reclus dans son palais de Yıldız, il établit un régime autocratique, modernise la bureaucratie, la justice, l’armée et l’enseignement.

Un Sultan qui souhaite unifier les Ottomans

Jouant de sa qualité de calife, il s’appuie sur les musulmans des provinces, s’efforce de freiner les aspirations nationales des Albanais, des Arabes et des Kurdes.
Prenant acte du recul dans les Balkans, il consolide la présence de l’État en Anatolie et au Proche- Orient. Cette politique se heurte à l’émergence du nationalisme arménien, aux pressions accrues de l’Europe, aux activités terroristes en Macédoine et, pour finir, à l’opposition des Jeunes Turcs.
La révolution de 1908 cantonne l’autocrate de Yıldız dans le rôle de monarque constitutionnel, avant de le déposer quelques mois plus tard. Sultan déchu, il s’éteint en 1918, l’année de la disparition de l’Empire.
S’appuyant sur les recherches les plus récentes, François Georgeon éclaire la figure controversée d’un souverain qui voulait à tout prix sauver « l’homme malade » et rêvait de faire de son empire un État moderne et une grande puissance musulmane.

François Georgeon est directeur de recherche et responsable de l’équipe d’Etudes turques et ottomanes au CNRS.
ABDÜLHAMID II le Sultan Calife – François Georgeon
Édition Fayard- 528 pages
ISBN 2-213-59929-7